Suis-je sacré ou profane ?


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Gaura Krishna

(Maurice, début 1992 - donnée en France)


Mes frères, mes soeurs,

 

Si j'ai choisi de vous faire part de quelques réflexions sur le sujet "sacré et profane", c'est peut-être parce que le terme de profane est souvent prononcé, de même que l'expression "entrer dans le sacré", et qu'il m'a semblé qu'on employait ces termes et expressions par simple habitude et donc de manière justement tout à fait ... profane.

Quant au titre "Suis-Je sacré ou profane", il est bien évident que le "Je" de cette question n'est pas le petit moi raisonneur qui aligne tous ces mots, mais le "Je" commun à tous. Nous disons tous "ma" main, "mon" pied, "ma" tête, etc..., les voyant donc comme des objets appartenant au sujet "Je", mais en parlant de nous-mêmes au-delà de tous ces objets, nous disons tous "Je". Ce "Je", qui est nous-mêmes et chacun d'entre nous, ce "Je" dénominateur commun de tous les êtres, ce "Je" pour la découverte Duquel nous sommes entrés en Quête, c'est bien entendu le "Je" de la question, comme le "Je" de toutes les questions.

Prenons les premiers enseignements de la tradition biblique. Nous pourrions prendre ceux de n'importe quelle autre tradition d'ailleurs que nous trouverions les mêmes premiers enseignements sous forme de symboles différents :

"Et l'Eternel Dieu dit : "tu mangeras librement de tout arbre du jardin, mais de l'arbre de la connaissance tu n'en mangeras pas; car au jour où tu en mangeras, tu mourras certainement.""

Du jour où il en a mangé, c'est à dire du jour où il a commencé à manger de la connaissance relative, autrement dit à mentaliser, l'homme a quitté le sacré pour le profane, s'oubliant soi-même. Et il meurt. Ceci est vrai pour lui, ainsi que pour la civilisation. Au début de ce que nous appelons par convention "la civilisation", tout n’était une seule science, à laquelle on pouvait aussi bien donner le nom de religion Dès que l'on a séparé cette science en plusieurs secteurs, et notamment qu'on l'a séparée entre religion d'une part et science de l'autre, ce par un artifice uniquement mental, alors la civilisation doucement s'oriente vers sa mort.

"Et l'Eternel Dieu forma une femme de la côte qu'il avait prise de l'homme, et l'amena vers l'homme". C'est l'apparition de la dualité. Avec la dualité naît le serpent mental. Il dit : "Vous ne mourrez certainement point si vous en mangez, car Dieu sait qu'au jour où vous en mangerez, vos yeux seront ouverts, et vous serez comme Dieu, connaissant le bien et le mal". Le mental de l'homme fait que, sous l'impulsion du désir, il cherche la connaissance, mais il cherche la connaissance relative, mentale, pensant que ce mental est la source de toute connaissance. Il s'imagine être semblable à Dieu, ne pouvant avoir conscience qu'il n'est qu'un dieu mental. C’est tout le symbole de Lucifer : le porteur de lumière, oui, mais de lumière mentale, d’où sa chute. C'est la tombée encore plus profonde dans le profane. "La femme vit que l'arbre était désirable pour rendre intelligent". L'arbre est désirable pour cultiver le mental. Mais combien de grands savants sont les rois des imbéciles ! Ils connaissent alors qu'ils sont nus, c'est la naissance de la connaissance mentale. Dieu dit "qui t'as montré que tu étais nu ?". En fait, c'est l'homme lui-même... Ayant quitté sa source, il s'aperçoit qu'il est nu. Avec le mental naissent toutes les perceptions.

En résumé, dès qu'il y a apparition de la dualité, il y a apparition du mental et de ce fait une tombée dans le domaine relatif. L'homme quitte sa source, son Soi profond et il s'imagine de ce jour être différent de la source. C'est la tombée du sacré dans le profane. L'homme a oublié sa source, et de ce fait vit dans l'illusion qu'il y a d'un côté, le sacré et de l'autre le profane. De ce fait il s'imagine que la connaissance naît de la matière, comme si tout ce qui est n'avait pas de source. Mais tout effet a une cause et si l'effet est intelligent, la source ne peut que l'être.

Quelle est donc la différence entre sacré et profane. En fait il n'y en a aucune, il s'agit tout simplement d'une illusion mentale qui fait naître pour l'homme une perception relative des choses et de lui-même.

Dans un âge que l'on pourrait appelé d'or comme il vient d'être dit, et ce dans toutes les civilisations, il n'y avait pas cette séparation que le mental fait naître entre plusieurs branches de la science et de la réalité. Il n'y avait qu'une seule science s'appliquant à une seule réalité, un tronc commun avec toutes ses branches reliées au même tronc. Cette science portait aussi le nom de Religion, c'était en fait la religion naturelle que l'on retrouvait partout, et qui a donné les différentes branches de ce que nous appelons la Tradition. Dans les Vedas qui datent de plus de 4.000 ans est exposée, outre tous les autres domaines de la science, la théorie du Big-Bang qui est toute nouvelle en occident. Plus que cela, ils datent le big bang, disent que l'univers sera en expansion jusque telle date, et qu'il va ensuite entrer en contraction pour revenir au point originel. J'ai lu il n'y a pas un mois (donc il y a 4 ans) que ceci était une toute nouvelle hypothèse pour nos grands savants qui appellent ce qui n'est encore pour eux qu'une hypothèse, le "grand scrunch". Il n'y a pas si longtemps un être comme PASCAL était tant un grand homme de science qu'un grand philosophe mystique. Pas si loin de nous, Albert Einstein débouchait sur le mysticisme. Jadis, il n'y avait pas plusieurs arbres de la connaissance, mais un seul. Mais le mental a la sale maladie de tout couper en morceaux et on a coupé les branches pour les replanter à part et en faire d'autres arbres. La médecine pour ne prendre qu'un exemple s'est divisée de l'arbre. Puis le mental continuant on a coupé les branches de cette branche et on en a fait ce que l'on nomme pompeusement des "spécialités". Et maintenant quand nous sommes malades du foie, nous avalons des drogues pour le soigner. Il n'est pas sitôt remis en état que nous nous apercevons que notre estomac en a pris un coup. On soigne donc l'estomac mais c'est bientôt l'intestin qui a des ratés, etc... Il n'y a plus de notion d'harmonie. Mais la famille humaine, la terre, et plus loin le Cosmos, est un seul corps et chaque élément a ses répercussions sur l'ensemble. Il en est ainsi de tout, et l’on divise de plus en plus, chaque spécialité donnant des sous-spécialités. De même le monde s’est divisé en nations, en pays, puis en sous-pays. Cette division a touché et continue de toucher tous les domaines, au fil de la chute.

Dans notre monde actuel, le nombre d'intellectuels, et de grands savants, qui continuent ainsi à diviser l'Un en plusieurs sont de plus en plus nombreux. Et chacun de ses spécialistes d'un domaine particulier voudrait tout expliquer par le seul domaine qu'il connaît et ne peut s’empêcher de sortir de nouvelles théories souvent bien farfelues. Pour ne prendre qu'un exemple : la psychanalyse, spécialité d'une spécialité qu'est la psychologie, voulait tout expliquer, et en fait tout réduire, à une infime découverte d'un nommé Freud. Beaucoup de "scientifiques" ne peuvent que nier la Force Unique puisqu'ils n'ont plus aucune notion de l'ensemble et de cette Force qui maintient cet ensemble en cohésion.

La division que l'on fait entre les âges, âge d'or, d'argent, etc..., est une division de l'involution de la conscience humaine qui fait suite à l'apparition mentale. Dès que le mental entre en ligne et coupe les choses, le monde s'oriente vers sa perte. L'âge d'or, que l'on appelle satya yuga, c'est à dire âge de la vérité, est dit se situer entre le niveau de conscience de 4/4 et le niveau de conscience de 3/4. L'âge d'argent entre le niveau de conscience de 3/4 et celui de 1/2. L'âge de bronze entre le niveau de 1/2 et celui d'1/4 de conscience, et le Kali yuga ou âge de fer entre 1/4 et zéro de conscience, âge où l'ego a recouvert toute la conscience de l'homme. Il n'y a alors pour lui même plus de division entre sacré et profane puisqu'alors, pour lui, tout est profane et que c'est le côté dit "religieux" qu'il lui apparaît être une illusion. Les choses et toutes les valeurs sont alors totalement inversées, et c'est réellement l'âge dans lequel nous vivons.

Les choses apparaissent sacrées à celui qui les voit comme nées d'une source consciente, elles apparaissent profanes à celui qui les voit comme nées d'une source sans conscience. La différence entre sacré est profane est donc une illusion qui dépend du degré de Conscience de chacun.

Cette descente et ces coupures successives s'appliquent à tous les domaines, tant à l'homme et à sa civilisation qu'aux différents pays du globe. Jadis il n'y avait aucune coupure entre l'Eglise et l'Etat. Il faut dire qu'à cette époque l'Eglise n'était pas le fait d'une secte. La société était divisée dans ce que l'on appelle les "castes" qui existaient partout. Les prêtres étaient chargés du côté dit "religieux", de telle sorte justement que l'homme reste toujours conscient de sa source, les "guerriers" étaient chargés de la défense de la Loi, de l'intégrité du territoire et de chacun, les commerçants étaient chargés de la subsistance des êtres. Il s'agissait donc d'une division horizontale de la société. C'est le mental qui les a fait, au fur et à mesure, apparaître comme des divisions verticales, coupant de ce fait les différents secteurs de cette société et rompant sa cohésion. Ainsi le secteur des prêtres, ou religieux, qui partait de ce que l'on appelait la LOI NATURELLE, la loi éternelle, a commencé avec la descente de la conscience, à se diviser en différentes religions au fur et à mesure de la continuation de l'involution de la conscience collective, chacune selon le degré de compréhension mentale restreinte de chacun. Ces mêmes religions avec le temps se sont divisées elles-mêmes en différentes sectes.

De ce fait, ce que l'on appelle Eglise n'était plus une et il est devenu impossible de conserver la communion des différents domaines, puisque dans chacun d'entre eux, comme actuellement en politique, il y avait des luttes. Ainsi en est-on arrivé à la séparation de l'Eglise et de l'Etat, et ce dans pratiquement tous les pays du monde, les religions, comme les états, faisant une séparation entre le domaine d'en haut et le domaine d'en bas. Les seuls pays dont la constitution contient encore la référence inaliénable à la religion sont le Tibet et le Népal, et dans les faits donc un seul, le Népal puisque le Tibet est sous la botte des Chinois et que même dans les atlas occidentaux on le considère comme n'existant plus mais faisant partie intégrante de la Chine, ce qui est proprement honteux. On en est donc arrivé au niveau de chaque pays à considérer qu'il y avait d'une part, les choses de la vie intérieure, et de l'autre, les choses de la vie extérieure, d'une part le sacré et d'autre part le profane, comme s'il s'agissait de deux choses séparées et qu'elles n'avaient ou ne devaient avoir aucune interrelation ! On a alors inventé de nouveaux termes. On parle de religieux d'une part et de laïc de l'autre. Tout le monde sait bien que la différence ne réside que dans la manière de chacun de considérer les choses. On parle encore, au niveau de pays, de communalisme et de sécularisme. La conscience relative de chaque groupe se heurte, et il y a de plus en plus de heurts puisque, l'involution continuant et le degré de compréhension diminuant lui aussi, il y a de plus en plus de divisions à l'intérieur de chaque groupe, chaque sous-groupe finissant lui aussi par se diviser.

A ce propos, même si j'avais prévu au début de ne surtout pas en parler, il est un pays ou la lecture de cette différence entre sacré et profane, est particulièrement claire. C'est, tout le monde l'aura deviné, l'Inde. L'Inde est un pays ou le système des castes était auparavant complètement horizontal et où tout était considéré comme sacré. Le terme hindouisme n'existait pas, puisqu'à vrai dire l'hindouisme n'existe pas, c'est un terme perse repris par l'occident. La religion de l'Inde comprend toutes les religions et les a toutes accueillies et son véritable nom est SANATANA DHARMA, ce qui veut dire la LOI ETERNELLE. La verticalisation des castes s'est accentuée avec les deux invasions que ce pays a connu, la première des musulmans, la seconde des anglais. Comme pour régner il fallait diviser, c'est ce qui a été fait de manière quasi scientifique. L'Inde qui acceptait toutes les religions et les respectait toutes autant s'est vue particulièrement divisée le jour où les anglais ont monté la division entre les hindous et les musulmans, ce qui a culminé avec la partition entre l'Inde et le Pakistan (qui, remarquons-le, s'est lui-même divisé ensuite entre Pakistan et Bangladesh). Par ailleurs ce pays s'est trouvé tout à coup avec cette division apportée par l'Occident entre le sacré d'un côté et le profane de l'autre. Beaucoup ont suivi puisque cela leur apportait un certain pouvoir. Les valeurs occidentales se sont heurtées de plein fouet avec cette civilisation aux valeurs éternelles, d'où une seconde division. Actuellement l'Inde est un pays que l'on pourrait considérer comme étant au bord du gouffre. Au niveau politique elle n'a rien à nous envier en ce qui concerne la corruption, les différentes communautés se heurtent, le terrorisme règne et l'économie n'a plus aucun souffle. Devant toutes ses tensions extrêmes, des rishis ou sages, qui jusqu'alors vivaient en ermites dans l'Himalaya ou ailleurs, ont été cherchés et certains ont considéré comme étant de leur devoir d'entrer dans la vie politique pour tenter de sauver Bharat Mata, Mère Inde. On trouve donc au Parlement indien tant de ce que nous appelons de "fins politiques" que quelques sages. L'hindouisme, qui sous la domination musulmane et anglaise avait été traité comme une religion pour primitifs etc..., connaît de plus en plus la renaissance. Il y a actuellement une lutte pour revenir à l'ancienne civilisation, en intégrant bien entendu les nouvelles valeurs venues de l'occident, mais où il n'y aurait plus séparation de l'Eglise et de l'Etat, mais réintégration totale avec non l'hindouisme et les autres religions, mais le sanathana dharma qui comprend toutes les religions. La lecture de cette différence entre sacré et profane, des différentes conceptions, et des luttes que cette différence de perception fait naître est donc plus aisée actuellement dans ce pays. Il ne s'agit pas d'autre chose que de recréer l'ordre à partir du chaos. Beaucoup pensent que la seule solution réside dans la revigoration de l'Hindouisme, et parlent de "criant besoin". Les sages voudraient faire revenir à la perception du sacré en toutes choses et en tous les êtres, mais comme cette perception dépend du degré de conscience de chacun, Mère Inde n'est pas prête de reconnaître tous ses petits.

Cependant, et cela je l’ajoute aujourd’hui, tous les sages de l’Inde ont prédit que ce pays redeviendrait la Mère du monde, et cela ne saurait tarder. L’Occident meurt et nous en voyons actuellement les derniers soubresauts, alors que l’Inde va revivre, et je me permets de prédire que cela va commencer en avril prochain. Le soleil de la civilisation aura alors fait un tour complet de la terre. Ayant commencé avec l’Inde il y a des milliers d’années, il est allé vers l’Ouest, passant de la Perse à l’Egypte puis à la Grèce, puis à l’Europe, puis à l’Amérique, ensuite au Japon, maintenant à la Chine et à la Corée et bientôt le tour sera fait.

 

Mes frèrres, mes soeurs, à partir du moment où la source est sacrée, tous les effets de cette source sont forcément sacrées. Il ne faut pas sortir de St Cyr pour comprendre ce raisonnement. Et comme la source est la source unique de tout, tout est forcément sacré.

Ainsi "sacré" ou "profane" ne sont que des mots, forgés par le mental limité de l'homme. En fait il n'y a ni sacré ni profane ou, autrement dit tout est sacré ou tout est profane. La meilleure manière de dire est simplement que "tout est".

On pourrait encore définir le sacré comme ce qui touche à l'intérieur, et profane ce qui touche à l'extérieur. Mais ceci n'est encore qu'une illusion.

Tout ce qui est en haut est comme ce qui est en bas. Se fondant sur ce principe, les anciens sages recherchaient la vérité à l'intérieur d'eux-mêmes et non, comme dans nos temps actuels, à l'extérieur. Les lois étant les mêmes, ils les découvraient et c'est ainsi qu'ils ont par exemple trouvé cette loi universelle de ce que nous appelons le "big bang". Tout ce qui est dehors est comme ce qui est dedans. Si ce qui est dedans est sacré, ce qui est dehors l'est aussi, le dehors n'étant qu'une extension, une respiration du dedans.

Considérer une chose ou un être, disons une entité comme sacrée, c'est simplement la respecter. Si l'homme moderne pense qu'il est avant tout un corps et que c'est de ce corps que naît la pensée, il devrait penser que son corps n'est qu'un amalgame de salade et légumes transformés. Que la mère de son corps est donc la Terre et qu'en cela elle est sacrée et donc respectable. S'il avait la notion de cette simple évidence, il respecterait sa Mère la Terre et n'en aurait pas fait une décharge qui la tue. La notion de sacré rejoint complètement la notion de profane dans ce simple exemple et on voit bien que ce ne sont que deux notions relatives d'une même réalité et qu'en fait, religion et science ne dont qu'une seule et même chose. Ce qu'il faut, c'est simplement respecter sa Mère. Respecter la Terre, c'est respecter son propre corps. S'il mange de la viande, alors son corps est aussi un amalgame de différentes parties d'animaux. Il doit donc, pour se respecter lui-même, respecter tant le domaine végétal que le domaine animal puisqu'il les contient. Le sacré est donc en fait le respect de soi-même. Il est particulier que le terme "profaner" une chose veuille dire la salir. Il est aussi particulier que l'expression "être profane en la matière" signifie ne rien en connaître.

"Sarvam khalu idam Brahma." "En vérité, tout ce qui est, est Dieu". C'est la quintessence de la Connaissance. Comme le dit SATHYA SAI BABA, "la vérité sur le vaste univers d'objets mobiles et immobiles est contenue dans cette simple proposition. Il n'y a rien dans ce Cosmos sans Dieu. La Divinité est latente dans toute chose comme le feu dans le bois ou l'huile dans le sésame. Il n'y a donc rien dans le monde qui ne soit imprégné par le Divin. Que l'homme le croie ou non, la roue de la création tourne selon la loi Divine... Le soleil brille et la lune porte ses doux rayons sur la terre. Les pluies tombent et les rivières coulent, les herbes poussent. Aucune de ces choses n'arrive par la volonté d'un seul homme. Tout être humain a un droit égal de jouir des bénéfices de ces choses. L'homme a malheureusement oublié cette vérité de base. Le sentiment d'une telle jouissance "égale" ne se trouve que chez les enfants. Seulement dans le coeur des bébés l'on peut noter le sens de l'enjouement, du boire du lait de la mère, de se réjouir du petit vent frais et de s'oublier soi-même dans les chansons enfantines de la maman."

Mon Maître Yogi Ramsuratkumar ne dit qu’une chose : « Mon Père seul existe ». Mais, au fur et à mesure que l'ordinateur, en d'autres termes le cerveau et le mental, se charge du programme inhérent à celui qui est entré "dans la bécane", tout se divise. Alors que l'enfant grandit les idéaux de "mien" et de "tien" croissent dans le mental et l'ego recouvre de plus en plus la Conscience, et le Soi est de plus en plus caché et oublié. On oublie l'omniprésence du Divin.

Le monde est rempli d'hommes puissants, d'hommes doués de richesses, de grands savants et d'hommes doués de grandes qualités, mais peu ont réalisé la sagesse. Les sages d'antan nous ont laissé ce que nous appelons la "Tradition" et nous ont laissé, par exemple, le concept du triangle. Le corps est un côté, le mental le second côté et l'âme le troisième. Le corps est grossier et l'âme subtile. Le mental coordonne les deux. Le corps est "ceci", l'âme est "cela", le rôle du mental est de mettre ensemble le corps qui est près des sens et l'âme qui en est loin. Il s'agit donc d'intégrer le corps et l'âme et réaliser l'union des trois : corps, mental et âme. Faire une différence entre sacré et profane est donc une simple déviation mentale.

Le triangle peut se voir d'un autre point de vue : l'individuel, Dieu et la Nature. Une autre triade est celle du grossier, du subtil et du causal, une quatrième du passé, du présent et du futur.

"Une graine est plantée dans la terre. Elle pousse, devient un arbre qui porte branches, feuilles, fleurs et fruits. D'où sont venues toutes ces manifestations ? Toutes viennent de la graine. Le fruit est-il profane par rapport à la graine qui est sacrée ? La graine déclare : "tous, vous êtes nés de moi".

C'est cette différenciation illusoire du mental qui fait naître la manifestation elle-même, comme on l'a vu, en des choses de plus en plus partagées, ce qui fait qu'en bout de course on n'a plus aucune notion de l'ensemble et comment cet ensemble tourne. La conscience se perd peu à peu et ainsi en arrive-t-on aux différents âges et au Kali Yuga avec perte pratiquement totale de la conscience, dans lequel nous vivons actuellement.

La seule manière de réformer cela est donc de repartir là où nous sommes, au plus partagé, c'est à dire à chaque individu. Tout dépend de son niveau de conscience, mais c'est le mental individuel qui participe au mental commun. C'est véritablement la construction du temple avec le polissage de chaque pierre. C'est à chacun, et c'est un des buts de notre ordre, de chercher la réalité ultime de chaque chose, et d'ôter l'illusion pour trouver l'homme nouveau et renaître à soi-même. Il convient d'ôter le vieil habit, cet habit qui fait voir quelque chose comme soit sacré soit profane. Si nous vivons tous dans l'esprit l'évidence de base que tout est sacré, alors chacun de nous respecterait tout et arriverait-on à voir tout comme étant partie de soi-même et donc à réellement "aimer son prochain comme étant soi-même". C'est en se comportant de la sorte que l'on peut ôter l'ego, en voyant tout ce qui nous entoure comme partie intégrante de nous-mêmes, ce qui est l'ultime réalité. Voir l'autre comme une incarnation divine amène inévitablement au respect et donc à la plus grande des tolérances, puisque cela amène d'abord à l'écoute....

Voir l'autre comme une incarnation divine au même titre que nous-mêmes, c'est exactement cela que veut dire "voir l'autre comme un frère". Et cela n'est pas seulement pour l'intérieur d'un temple ou d'une église qui ne sont qu'une représentation du Cosmos, mais pour tout puisqu'il n'y a pas d'extérieur du temple. Nous ne sortons jamais du temple.

On aboutit à la Loi d'Amour par laquelle Tout le Cosmos se tient et demeure, Unique Force qui fait mouvoir les hommes, l'Univers et les Dieux.

 

Pourquoi un ciboire serait-il plus sacré qu'un brin d'herbe ? Simplement par le symbole qu'on lui surimpose. Mais un tel symbole peut aussi être appliqué au brin d'herbe. Et, en plus le brin d'herbe a la vie alors que le ciboire ne l'a pas. En fait, dans le courant de l'évolution, le brin d'herbe est bien plus sacré que le ciboire. Tout est question de surimposition mentale. En fait, comme le dit Sathya Sai Baba, la Création est le premier symbole de la Conscience Divine. La divinité en l'homme, qui est partie de la création, n'est pas quelque chose de distinct. Dieu n'existe pas comme quelque chose à part.

C'est en fait la même discussion que celle de la dichotomie entre la matière et l'esprit. La matière n'existe pas et c'est bien connu. La matière n'est qu'une vision relative. C'est un ensemble d'ondes qui nous apparaît d'une manière différente que l'être qui vivrait sur un atome de notre peau et qui verrait autour de lui tout un univers avec des galaxies. Çà n'est qu'une vision relative. Et toute chose relative doit en définitive être repoussée comme illusoire pour celui qui est en quête de la vérité éternelle et absolue. Se forcer à voir une différence entre la matière et l'esprit est donc s'accrocher à une vision séparatiste de l'être. En réalité, Dieu est l'architecte, mais il est aussi la pierre, celui qui la polit, etc, et il est aussi l'oeuvre... La différence entre la matière et l'esprit n'est qu'une différence de niveau de conscience, exactement comme la différence entre le sacré et le profane tient à la différence du degré de conscience de ceux qui donnent ces épithètes.

Tant que l'homme restera dans ce domaine mental relatif, il ne pourra avancer. Tant qu'il demeurera dans cette séparation qui n'est que mentale, comment serait-il possible pour lui d'aller justement au-delà du mental où se trouve l'Eternelle Vérité ?

"C'est une suprême folie de considérer que le spirituel est séparé du physique et que le monde matériel n'a aucune connexion avec la spiritualité. La spiritualité court comme un courant souterrain à travers tout aspect de la vie - social, politique, économique et moral. Cette vérité de base a été oubliée aujourd'hui. Les gens ont foi dans l'impermanent, l'éphémère et l'illusoire."

Nous devons penser le Cosmos entier comme le corps du Suprême, constitué des éléments. L'élément le plus vital pour l'homme est l'eau. Elle soutient la vie. Le second élément essentiel est le feu qui réside dans tout homme sous la forme du feu digestif. Sans lui l'homme serait incapable de digérer la nourriture qu'il consomme et le recevoir l'énergie qui le soutient et qui vient de cette nourriture. Le troisième est la terre. Le processus de naissance, de croissance et de dissolution prend sa place par la terre. Le quatrième est l'air, associé intimement à la vie. Chaque homme utilise l'air pour respirer, chaque jour l'homme inhale et exhale 21.600 fois. Le cinquième élément qui soutient les 4 autres est l'éther dont le son est la forme.

Si tout était vu comme sacré comme il l'est en réalité, il y aurait aussi respect des éléments, et donc de l'homme lui-même. Un mésusage des éléments fait l'homme devenir victime de ce que l'on peut donc valablement appeler un déplaisir divin. Les 5 éléments se retournent alors contre l'homme. Il n'y a en fait aucune différence entre le voir comme déplaisir divin ou choc en retour ou réaction d'une action.

Les sons que l'on perçoit dans la vie de tous les jours sont un scandale de cacophonie. Les oreilles étant polluées, le mental qui reçoit les perceptions devient pollué d'entendre de mauvaises choses. L'air respiré est pollué, l'atmosphère entière est polluée, la nourriture consommée est polluée. Tout ceci parce que l'homme ne considère pas la nature et les éléments dont elle est formée comme sacrés alors qu'ils le sont en réalité. Il les dit éléments profanes alors que c'est lui-même qui les profane. Mais toute action ayant sa réaction, il en subit le choc en retour, car ce qui est dedans est comme ce qui est dehors et l'homme ne se soutient que par son environnement. Polluer l'environnement c'est se polluer soi-même. Et le mental de la civilisation est pollué. Parce que l'homme transgresse les lois de la nature qui sont divines.

Tout ce qui est appris aujourd'hui par l'éducation sert uniquement à polluer le coeur. Elle est confinée à ce qui promeut l'intérêt personnel et l'égoïsme. L'éducation devrait permettre de réaliser l'unité de tous les êtres. "Apprendre d'un scientifique la composition chimique de l'eau est une sorte de savoir qui peut aider l'homme à trouver un emploi. Mais comment faire un bon usage de l'eau afin que tous en retirent un bénéfice est une connaissance de l'Esprit. Quand la connaissance mondaine et la connaissance spirituelle vont de concert, alors la vie peut être divinisée".

Tout est sacré. Si cette pensée est la notion mentale que nous nous efforçons d'adopter, alors nous nous entraînons à vivre au-delà du mental et le monde environnant devient tout à fait différent. On le perçoit comme une unité où tout est relié à tout et où cette liaison s'appelle l'Amour. Percevoir tout comme étant divin, c'est commencer à véritablement aimer.

Aimer même son ennemi, puisque cet ennemi est une partie de soi et est aussi habité par le Divin. C'est l'ego qui le perçoit comme ennemi, mais non le "Je" puisqu'il est commun aux deux. L'ennemi supposé croit agir contre nous mais il n'est pas conscient que, si nous considérons tout comme sacré, le mal qu'il est supposé nous faire n'est qu'une expérience nous permettant de grandir en conscience. Le véritable mal, il se le fait à lui-même sans en avoir conscience. Donc peu importe ses sentiments envers nous puisqu'ils ne regardent que lui-même et n'agissent que sur lui-même, même si une telle inconscience nous rend malheureux. Lui aussi est sacré et nous devons le percevoir, le voir, ainsi que tous les autres, comme une pierre indispensable sans laquelle il ne peut y avoir d'édifice.

En fait, il ne faut pas raisonner en termes de religieux ou de profane, comme si ces termes s'excluaient l'un l'autre, mais en termes d'ouverture de Conscience de Soi. Plus la conscience s'ouvre et plus les choses deviennent sacrées puisque plus on devient conscient du Soi inhérent à toutes choses. Au niveau relatif, est sacré tout ce qui peut nous élever intérieurement, et le reste est profane. Car au niveau relatif, il est faut de dire par exemple que toutes les musiques se valent, cela est parfaitement ridicule, elles sont quelquefois complètement opposées, selon les trois forces de la nature. La Missa Solemnis ne produit pas le même effet que le hard-rock, même les plantes en savent quelque chose, puisque même elles crèvent du hard rock et s’épanouissent avec la Missa Solemnis. Mais justement cela dépend de l’évolution intérieure de chacun. C’est la loi universelle de la nature. Il n’y a rien de pire que le fameux : « je suis éclectique ». « Je suis éclectique » signifie simplement : « je suis intérieurement complètement ignorant ». Simplement, la véritable tolérance est de reconnaître que des niveaux de compréhension intérieure et d’expérience intérieure puissent exister. C’est simplement reconnaître que l’évolution existe, du tout profane au tout sacré, là où ces deux mots s’annihilent.

Si en entrant dans le temple, il nous semble que nous pénétrons dans le sacré, c'est juste parce que nous changeons notre mental pour l'ouvrir à la Conscience.

De même les choses de la science ne s'opposent pas à la religion puisqu'en fait elles ne sont qu'une seule. C'est l'ouverture de la conscience qui les fait apparaître comme scientifiques ou religieuses. A partir du moment où la nature est le corps de Dieu, la science devient religion. Si une secte a un enseignement contraire aux vérités objectives et prouvées de la science, cet enseignement est forcément erroné. Mais si un enseignement religieux est simplement rejeté par les scientifiques parce qu'a priori ne revêtant pas un caractère scientifique, alors c'est l'homme de science qui fait un raisonnement erroné. Tant que la science n'a pas prouvé le contraire, la chose ne peut a priori pas être démentie si elle obéit à une certaine logique. Mais la science est sacrée aussi quand elle permet de mettre à bas des croyances aveugles et débiles, car elle est instrument de lumière en ôtant l'obscurité. Elle est alors plus religieuse que ladite religion en question. C'est alors cette religion qui est complètement profane puisqu'elle va dans le sens d'un obscurcissement de la conscience. Et la science ne peut déboucher que sur la religion et le profane rejoindre le sacré. Et il semble de nos jours que l'on peut voir les différentes branches appelées à regagner le même tronc. Quand la science débouche sur le principe d'incertitude, quand elle a démontré que la matière n'était qu'illusoire, quand elle dit que tout est né d'une Energie Primordiale, on ne voit plus bien où se trouve la barrière entre les deux et on perçoit que cette barrière n'était qu'une illusion mentale.

Certains appellent cela l'avènement de l'ère du Verseau. Mais il semble bien qu'un nouvel âge soit sur le point de commencer, parce que l'homme a tout ce qu'il veut et son matérialisme a conduit à l'égoïsme, à tuer la nature et il est plus malheureux qu'avant. Comme un petit garçon avec ses petites autos, il a eu toutes les petites autos. Maintenant il a besoin de lui-même. Il a utilisé son intellect pour sa propre destruction, comme nous avons vu que le chapitre de la Genèse le décrivait bien. Si nous prenons la tradition hindoue nous avons la même chose avec une autre histoire : Dieux et démons barattent l'océan de lait, symbole du mental, pour obtenir la liqueur d'immortalité. Il en sort plein de merveilleuses choses mais aussi un poison mortel qui peut tout détruire. Dieux et démons deviennent effrayés car nul ne sait comment enlever le poison. Il ne leur reste plus qu'une solution : ils invoquent SIVA qui apparaît et reçoit le poison dans Ses mains. Le poison se transforme en un merveilleux ornement autour de son cou. Et enfin vient l'amrita, la liqueur d'immortalité, c'est à dire la réalisation.

Je terminerai par une citation du sage déjà cité :

"C'est folie pour quiconque d'aller à la recherche de Dieu. Quand Dieu est omniprésent, quel est le besoin d'une recherche ? C'est une illusion d'imaginer que l'homme est en quête de Dieu. C'est Dieu qui est en quête d'un véritable homme".

N'est-ce pas ce qui est contenu dans la maxime

"Ici et maintenant ?"